Si t’es radieux(se), vas à Marseille !

Structure béton Cité Radieuse Le Corbusier à Marseille

Destination Marseille pour l’une de mes pérégrinations estivales de photographe passionné d’architecture avec, pour commencer, un petit pèlerinage à la Cité Radieuse de l’architecte Le Corbusier.

La période actuelle permet au photographe d’architecture et du patrimoine que je suis de visiter des constructions souvent quasi désertées par les touristes mais la contre-partie c’est qu’une partie de ces lieux restent encore fermés.
Il ne m’a donc pas été possible, en ce mois d’août 2020, de visiter l’école située à l’avant-dernier étage de la cité radieuse ni le Gymnase dans lequel se trouve le Mamo, le centre d’art situé à l’intérieur du gymnase, sur le toit du bâtiment.
Heureusement, j’avais eu l’occasion, par le passé, de visiter l’école de l’unité d’habitation de Firminy.

L’unité d’habitation par Le Corbusier

La Cité Radieuse de l'architecte Le Corbusier à Marseille

Après la Seconde Guerre mondiale, la France a eu besoin de reconstruire rapidement des villes nouvelles et des habitations avec des logements sociaux.
L’État français passa donc commande, auprès d’architectes comme Le Corbusier, de la construction de logements destinés à des familles modestes et de classe moyenne.
Ces familles allaient découvrir pour la majorité d’entre elles la cuisine intégrée et la salle de bains !

Pour l’architecte, l’amélioration du cadre de vie, l’optimisation des coûts de construction ainsi que l’intégration d’espaces d’agrément ou de service comme des commerces ou des équipements communs faisait sens.
Il s’agissait aussi d’augmenter les dimensions des habitations afin d’y loger beaucoup de familles et de les intégrer dans des espaces vert.

La cité radieuse de Marseille, terminée en 1952, fait partie des 5 «  unités d’habitation de grandeur conforme », selon les termes de Le Corbusier, qui ont été construites durant les années 50 et 60, comme la Maison Radieuse de Rezé en 1955 et les unités d’habitation de Berlin en 1957, de Briey en 1961 et de Firminy-Vert en 1967 (après le décès de l’architecte).

La Cité Radieuse de Marseille

Cheminee en béton à la Cité Radieuse

Il s’agit d’une “unité d’habitation” de 18 étages de 56m de haut surmonté d’une tour et d’une grande cheminée “de bateau”.
Le bâtiment mesure 137m de long par 24m de large et comprend 337 appartements en duplex.
A chaque étage un couloir très large est surnommé “rue centrale”.

Au niveau de la construction, la répétition d’éléments en béton brut génère une certaine forme d’austérité et participe au courant architectural du Brutalisme dont Le Corbusier est l’initiateur.

La cité radieuse de Marseille, à la différence d’autres unités d’habitation réalisées par le Corbusier, possède à mi-hauteur du bâtiment une rue centrale avec des commerces (librairie, pâtisserie), un hôtel et un restaurant ainsi qu’une crèche.
L’immeuble à perdu de sa vocation sociale et attire désormais plutôt une population de cadres supérieurs ou de professions intellectuelles.

Aujourd’hui, la cité radieuse est un site classé par l’UNESCO et fait partie du patrimoine architectural français.

École et toit

Vue du toit de la Cité Radieuse de Marseille

L’avant dernier étage de l’immeuble accueille une école.
Au dessus, un toit terrasse abrite des équipements publics et son accès est toujours possible même si une grande partie est privative.
On y trouve, par exemple, une pataugeoire pour enfants et une piste d’athlétisme !

Vue sur le toit de la Cité Radieuse

L’ancien gymnase à été transformé en un espace de création artistique d’expositions temporaires chapeauté par le designer Ira Ito.

Vue du gymnase hébergeant le Mamo sur le toit de la Cité Radieuse

Étrange idée

Une cour de récréation d’école maternelle sur le toit d’un bâtiment de 18 étages ?
De quoi mériter, pour la Cité Radieuse de Le Corbusier, son surnom Marseillais de « la maison du fada ».

La cité idéale, fascinante ou fascisante ?

Détail de structure en béton de la Cité Radieuse

Utopie urbanistique, l’architecture des unités d’habitation de Le Corbusier est l’héritière du vieux concept de la Cité idéale et est basée sur des préceptes moraux et politiques qui vise à la perfection architecturale et le bien-être humain en lien avec son espace vital. Cette vision imposée d’un monde idéal et d’une vie communautaire et sécuritaire à l’intérieur d’une construction s’est avérée un peu inadaptée à notre monde moderne et à notre soif de liberté, mais découvrir cette architecture conceptuelle jusqu’au moindre détail reste quelque chose de fascinant.

En ce début de XXIème siècle, nous commençons à comprendre que notre monde risque de devenir aussi inhospitalier qu’une planète lambda, il est donc fort possible que les architectes du futur aient à travailler aussi sur des formes de cités idéales.

Le Modulor

En 1945 Le Corbusier met au point un concept architectural surnommé Modulor, une sorte d’unité de mesure basée sur l’association du terme “module” et du nombre d’or qui prend la forme d’une silhouette humaine.

Représentation du Modulor par Le Corbusier

Le Modulor est composé de subdivisions en rapport avec le nombre d’or qui sert à déterminer la taille des espaces, la hauteur sous plafond (qui équivaut au bras tendu), ainsi que la taille du mobilier.

Utilisé à partir des années 1950 pour la première fois pour déterminer toutes les mesures de la Cité Radieuse, puis pour les 4 autres unités d’habitation, sa silhouette apparait souvent comme une signature sous la forme de bas relief inscrit dans les façades en béton.

Modulor Le Corbusier en bas relief dans le béton

Le Corbusier utilisera aussi le Modulor dans la conception d’édifices cultuels comme, par exemple, pour la chapelle Notre-Dame du Haut de Ronchamp ou l’église du Couvent de la Tourette.


Vue recadrée sur la pataugeoire au sommet de la Cité Radieuse
Modulor en chair et en os sur le toit de la Cité Radieuse.